Le Skrei est un cabillaud exceptionnel qui diffère considérablement de ses frères de la même famille de poissons. La morue commune est présente dans tout l’Atlantique Nord. Lorsqu’il n’a pas encore atteint sa maturité sexuelle, le jeune poisson, petit spécimen de la Baltique est est appelé cabillaud. Sa chair plutôt fade est parfaite pour la production de poisson pané. Les queues panées et frites, elles, sont plus goûteuses.
Skrei – un poisson noble extraordinaire
Le Skrei, le cabillaud d’hiver norvégien, est en revanche un poisson noble en termes culinaires. Il vit dans la mer arctique de Barents. Dès qu’il atteint la maturité sexuelle vers 5- 7 ans, il migre (Skrei signifie « randonneur » en norvégien) bien nourri dans les eaux glacées de la mer de Barents pour frayer sur plus de 1.000 km jusqu’aux Lofoten norvégiens. Il utilise ici les eaux légèrement plus chaudes du Gulf Stream (4 à 7 °C) pour se reproduire au large des côtes norvégiennes. Cette migration a lieu chaque année pendant les mois d’hiver, de janvier, voire février, jusqu’en avril.
Histoire
Depuis des siècles, la pêche du skrei en hiver a rythmé la vie des pêcheurs des îles Lofoten. Pendant la saison de pêche, ils vivaient loin de la maison dans des cabanes en bois modestes le plus près possible des bateaux et des zones de pêche. On peut encore aujourd’hui visiter ces cabanes toutes simples, les « rorbu » (ror signifie « rame » ou « ramer », et bu, « petite maison »). Elles ont été à multiples reprises restaurées pour le tourisme. Au petit matin, dans l’obscurité, les pêcheurs ramaient vers les lieux de pêche et rentraient tard le soir. Plusieurs centaines de kilomètres au nord du cercle polaire, à cette saison, il ne fait jour que quelques heures par jour, sur l’heure de midi. Le temps est de plus imprévisible et la mer glacée dangereuse.
La pêche au skrei est dangereuse et épuisante
Les petites barques employées autrefois dans la mer agitée ont été équipées il y a à peine un siècle d’un moteur. Jusqu’à aujourd’hui, les bateaux de pêche sont minuscules malgré la technique moderne. On ne peut pêcher qu’à la ligne ou à la canne (pas de filets). Les quotas de pêche sont très stricts. La pêche au skrei reste aujourd’hui encore une affaire d’hommes, un dur travail physique, demandant courage, résistance et force musculaire.
Le skrei est exporté depuis le Moyen-âge jusqu’en Europe du Sud. Il fallait le rendre conservable pour les longs transports. Ceci perdure encore aujourd’hui avec une partie du skrei pêché. Séché en entier sur des structures en bois, il devient le « Stockfish ». Découpé en morceaux, séché sur les rochers, il prend le nom de « Klippfish ». Dans une variante vraiment raffinée, on trouve les morceaux de filet salés appelés « Bacalhau humides ». Dans la cuisine portugaise de tous les jours, la morue salée, appelée « bacalhau » fait toujours partie aujourd’hui des aliments de base omniprésents. En Italie, elle s’appelle « Stoccafisso », en Espagne « bacalo » tandis qu’en France, la brandade de morue a trouvé sa place dans la cuisine étoilée.
Seul le cabilllaud frais certifié peut être appelé skrei
Le conseil norvégien des produits de la mer (NSC, Norwegian Seafood Council) a fait en sorte que seul le cabillaud frais certifié par lui selon des normes très strictes ait le droit de porter l’appellation Skrei. Les critères de qualité contrôlés, pour la pêche contrôlée et durable, les bateaux à ligne ou à canne à main, l’exsanguination complète du poisson à bord et le nettoyage immédiat à l’eau de mer. Le débarquement du poisson frais doit se faire dans les 4 heures. Seules les entreprises certifiées par le NSC sont autorisées à travailler le poisson. La chaîne du froid doit être garantie de la pêche à la vente. Les contrôleurs du Skrei du NSC surveillent continuellement le respect du règlement strict. Le skrei certifié se reconnait à l’étiquette distinctive apposée sur la nageoire dorsale.
Le Skrei – une base de produits fins typiquement norvégiens
Les langues de skrei, qui ne sont pas commercialisées chez nous, sont particulièrement appréciées en Norvège. Salées et poivrées, tournées dans la farine elles sont cuites au beurre à la poêle jusqu’à être bien croustillantes. Ceci n’est pas le cas pour les joues, contrairement à ce qu’on prétend souvent. Les têtes sont séchées en entier et exportées en Afrique pour la préparation des soupes de poisson. Il n’y a qu’en Norvège qu’on trouve les œufs fraîchement fumés, on les trouve également pressés en boîte de conserve, ou en tube, sous forme de « caviar » crémeux. En Norvège, les œufs de skrei pressés sont coupés en tranches et cuits à la poêle.
Les filets levés doivent toujours mariner dans un mélange de sel et de sucre (4 c. à soupe de sel, 1 c. à café de sucre pour 600-700 g de filets de skrei), selon la recette pendant une heure jusqu’à toute une nuit, pour resserrer les pores.
Le Skrei poché dans le lait est divin
Le filet de skrei se prête particulièrement bien au pochage, la chair reste bien ferme et est cuite après 12 minutes de cuisson dans un court-bouillon à env. 90 °C. Poché au lait, la chair reste merveilleusement blanche. La cuisson à la poêle doit être aussi courte que possible à feu doux afin que le filet de poisson ne se décompose pas. Une cuisson totale d’environ 8-9 minutes suffit, 90 % du temps de cuisson sur le côté de la peau. Lors de la cuisson à la vapeur, un filet de skrei est translucide au bout d’env. 8 minutes à 85 °C, et d’env. 5 minutes à 100 °C. Au four à 180 °C, 8-9 minutes suffisent pour la cuisson.